Chapitre 1

La naissance se préparait, Maillis serrait les dents, la douleur était si forte qu’elle craignait de ne pouvoir aller jusqu’au bout. Pourtant, ce n’était pas son premier enfant, mais le médecin n’avait pas été très optimiste pour ce second accouchement. La petite maison en bois que Maillis habitait était maintenant animée par les bruits de pas précipités, ainsi que ses propres gémissements. Lorsqu’enfin son mari, Lewis, lui attrapa la main, Maillis se détendit légèrement.

« -Le médecin arrive ma chérie, tient encore quelques minutes ! » supplia Lewis complètement paniqué à l’idée de voir son enfant naitre sans médecin pour assister sa femme.
« -Je ne sais pas si j’en suis capable ! »

Et en effet, le médecin arriva juste à temps pour libérer le bébé et l’obliger à pousser son tout premier cri. Malgré les prédictions du médecin, Maillis s’en était sortie comme un chef. Faisant abstraction de la fatigue et des douleurs qui lui traversaient encore le corps, la femme prit son bébé dans ses bras. C’était une fille, une magnifique fille qui avait les yeux de son père. Un grand sourire sur les lèvres, Lewis finit par prendre place auprès de sa femme et sa fille avant de s’adresser directement au nouveau né.

« -Bienvenue dans la famille, jolie Satine ! »

Chapitre 2

La jeune Satine était maintenant âgée de dix ans à présent, elle avait bien grandi et elle était devenue une jeune fille très vive d’esprit, curieuse et très remuante. Elle ne tenait jamais en place, cela en était même fatiguant pour ses parents qui ne cessaient de lui demander de se calmer. A l’école, Satine était une élève assez douée mais qui avait du mal à s’intéresser aux matières enseignées. Aux yeux de ses camarades, elle apparaissait comme une enfant plutôt étrange, souvent dans la lune et qui ne jouait jamais avec les autres. Elle était souvent exclue parce qu’elle habitait à la lisère d’une forêt dans une maison faite de bois.
Elle supportait les moqueries sur elle, sans jamais broncher. Satine se moquait bien de ce que les autres pouvaient dire ou penser d’elle. Sa famille était la chose la plus importante à ses yeux, c’était en compagnie des siens qu’elle se sentait le mieux.

Satine passait le temps des récréations, perchées dans un arbre, un livre sur les genoux. Elle n’aimait pas courir dans tous les sens, crier pour un rien, comme les autres enfants pouvaient le faire, alors forcement, cela attirait l’attention.

« -Hé ! La folle ! Tu en as pas marre de rester là-haut toute seule ? »
« -Arrête de lui parler, elle pourrait croire qu’on veut jouer avec elle. »

Satine ne levait même pas le nez de sa lecture, les ignorer était la meilleure des méthodes, c’était une des spécialités de la jeune enfant.

« -T’es vraiment bizarre… Mais tes parents sont encore pires ! Des fous, juste bon à enfermer dans un asile ! »

Cette fois ci, la mâchoire de Satine se serra. Autant elle pouvait facilement encaisser les médisances à son sujet, autant elle détestait que l’on critique sa famille. Refermant brusquement son livre, elle posa son regard sur le garçon qui avait osé dire une telle idiotie.

« -Tu te crois plus malin que les autres ? » asséna t-elle froidement.

Puis, elle se laissa glisser de l’arbre pour atterrir doucement sur ses pieds. Sans crier gare, elle envoya son poing contre la joue du garçon, qui tomba à la renverse, surpris de cette réaction. Elle ne le laissa pas respirer, se jetant sur lui tel un tigre sur sa proie. Il allait payer les mots insultants sortis de sa bouche. Et il avait beau crier, pleurer et hurler, Satine n’avait pas l’intention de s’arrêter avant d’avoir vengé ses parents. Cependant, un professeur vint les séparer, obligeant Satine à s’éloigner du garçon à présent recouvert de bleus et de coupures.

Satine sera renvoyée de l’école quelques jours plus tard, au grand damne de ses parents, légèrement désabusés devant la violence dont pouvait user leur fille.

Chapitre 3

Avec le temps, Satine s’éloignera de plus en plus de sa famille, emmurée dans son silence, elle n’accordera plus que quelques mots à ses parents. Devenue une jeune adolescente très perturbée, elle ne cessera de repousser toute personne souhaitant l’aider. Elle avait cette sensation que s’attacher aux autres, s’était se créer un point faible, une ouverture pour que les autres puissent vous atteindre.
Scolarisée dans un nouveau lycée, Satine recommença son petit jeu habituel, ne parlant à personne et laissant apparaitre d’elle l’image de quelqu’un qui ne s’intéresse pas aux autres. Alors rapidement, elle se retrouva de nouveau mise de côté, sans que personne ne veuille lui parler. Personne sauf une fille, âgée d’à peine un an de plus qu’elle, qui ne cessait de venir vers elle pour discuter.
Un jour, alors que tous les élèves étaient rentrés chez eux depuis une bonne heure et que Satine était bien confortablement installée dans la bibliothèque, le nez encore et toujours dans un bouquin, Evy fit son apparition, un immense sourire sur le visage, avant de prendre place à côté de Satine.

« -Je me doutais bien que tu serai dans le coin. »

Satine posa son regard sur Evy, gardant tout de même le silence. Cette fille lui faisait une drôle d’impression. C’était comme si un nuage de mystère l’entourait, elle avait beau l’observer, Satine n’arrivait pas à la cerner. Elle dégageait cependant quelque chose de doux et d’agréable, c’était la première fois depuis longtemps que Satine n’avait pas envie de cracher son venin sur quelqu’un.

« -Ah, je comprends, tu préfères le silence. » ajouta Evy devant l’absence de réaction de Satine. « -Ca tombe bien, moi aussi. »

Les deux filles restèrent deux heures sans échanger un mot, Satine retournant à sa lecture, tandis qu’Evy faisait ses devoirs. Ce petit manège dura pendant plusieurs semaines, Evy venait régulièrement retrouver Satine à la bibliothèque pour passer un moment silencieux. Jusqu’au jour où enfin, Satine décocha son premier mot.

« -Tu n’en as pas marre ? »

Evy secoua la tête en réponse avant de lui adresser un sourire. Elle avait l’air heureuse que Satine ouvre enfin la bouche. De son côté, Satine retourna à sa lecture, ressentant une sorte de soulagement d’apprendre qu’Evy allait rester avec elle encore aujourd’hui.

Chapitre 4

Satine et Evy étaient devenus de très bonnes amies, elles s’entendaient merveilleusement bien, d’ailleurs, Evy adoucissait même le caractère de la jeune demoiselle. Elle restait toujours aussi associable avec les autres, mais beaucoup moins agressive, et surtout, beaucoup moins sombre. Maillis et Lewis l’avait même remarqué, leur fille avait un peu changé. Pour son seizième anniversaire, ils décidèrent donc d’inviter Evy à dormir chez eux, laissant la maison aux filles pour la soirée. Ce fut avec une excitation non dissimulée que Satine accueilli son amie chez elle, elle avait prévu une soirée film d’horreur, avec au menu des hamburgers et du popcorn. Les parents laissèrent les deux filles ensemble, ayant prévu un diner au restaurant.

« -Alors, pour commencer je te propose les zombies de la mort 2 ou bien les mystères de Pennsylvanie. »
« -Aller, va pour les zombies de la mort 2 ! »

Les deux adolescentes s’installèrent devant la télé, et enchainèrent trois films tout aussi sanglants les uns que les autres. Mais elles étaient plutôt du genre à rigoler devant le film, plutôt qu’à avoir peur. La soirée se déroulait bien, jusqu’au moment où Evy s’enferma dans la salle de bain. Elle y resta un long moment, inquiétant Satine qui se décida à aller frapper à la porte.

« -Evy ? Il y a un problème ? Tu veux bien m’ouvrir la porte s’il te plait ? »

Une sorte de grondement sourd se fit entendre, suivi d’un bruit de verre cassé. Satine était partagée entre l’envie de rire, pensait qu’Evy lui faisait une blague, et la sensation que quelque chose de vraiment grave était en train de se passer.
La porte finit par s’ouvrir dans un violent craquement, faisant sursauter la pauvre Satine qui savait à présent que ce n’était pas une blague. En observant Evy, elle pouvait se rendre compte que la douceur qu’elle dégageait laissait à présent place à quelque chose d’effrayant.

« -Je suis désolée… »

Evy finit par disparaitre totalement, laissant place à une créature repoussante : un loup garou. Satine eut à peine le temps de réaliser que le loup se jetait déjà sur elle, la mordant violement à la jambe. Satine poussa un hurlement de douleur, elle n’était pas du genre chochotte, mais elle n’avait jamais connu telle douleur. Le loup ne s’arrêta pas ici, labourant sa peau à coups de griffes jusqu’à ce que Satine perde totalement connaissance.

Ses parents rentreront quelques heures plus tard, retrouvant la maison sens dessus dessous, ainsi que leur fille au milieu d’une marre de sang. Elle fut immédiatement amenée à l’hôpital où elle subi de multiples opérations. Plongée dans un coma artificiel, son pronostic vital était engagé.
Contre toute attente, Satine finit par s’en sortir, guérissant bien plus rapidement que les médecins pouvaient l’imaginer, et deux semaines plus tard, elle fut de retour chez elle.

Chapitre 5

« -Nous n’avons pas le choix, tu le sais très bien… »

Lewis venait d’enfermer sa fille à triple tour dans la cave qui servait à l’origine de cave à vin. Depuis qu’ils avaient découvert ce qu’était devenue leur fille, ils n’avaient d’autre choix que de l’enfermer dès la pleine lune venue. Il était hors de question de la laisser vagabonder, elle était bien trop dangeureuse. Cela était arrivé une fois, la toute première fois qu’elle s’était transformée, depuis, elle avait interdiction de sortir les soirs de pleine lune, elle devait rester à la maison bien sagement, à attendre que tout se passe.

Cela dura pendant deux ans, deux longues années pendant lesquelles Satine perdit le gout de vivre. Elle avait l’impression de n’être qu’un monstre bon à être enfermé. Elle détestait perdre le contrôle d’elle-même, ne pas pouvoir se maitriser était tout simplement un cauchemar. Surtout que même sous sa forme humaine, il lui arrivait d’utiliser trop de force et de casser des objets.

Et puis, vint enfin la solution de Night Hall, même si cela ne faisait guère plaisir à Satine, elle se résigna à aller là-bas pour soulager ses parents. Elle ne supportait plus de voir la peur dans leurs yeux dès qu’elle faisait un mouvement un peu trop brusque ou qu’elle les surprenait sans le vouloir.
Night Hall fut donc une bouffée d’air frais pour Satine, même si elle avait beaucoup de mal à s’intégrer. La seule personne en qui elle avait confiance l’avait plus ou moins trahi, alors avant de pouvoir faire de nouveau confiance comme elle l’avait fait avec Evy, il faudrai surement un petit moment…